FIN DE PARTIE


 
 

NOTE D’INTENTION
 


 
FIN DE PARTIE OU L’APOCALYPSE JOYEUSE
 
Tout est calme en cette fin d’après-midi nuageuse. Clov monte à l’échelle pour vérifier à la fenêtre si rien n’a changé à l’extérieur du refuge. Puis il prépare Hamm, aveugle et paralytique, qui finit sa sieste sur son fauteuil, avant de retourner dans sa cuisine regarder son mur.
D’humeur à jouer, Hamm siffle Clov, son fils adoptif, pour que ce dernier vienne lui donner la réplique. Alors commence la joute. Ils jouent ainsi à passer le temps, alternant les complicités et les piques, toujours à l’affût du moindre événement, Clov menaçant continuellement Hamm de le quitter et Hamm s’amusant avec Clov comme le chat avec la souris.
 
On a toujours l’impression de connaître Beckett, alors qu’il ne cesse de nous surprendre tant son écriture est radicale.
Auteur du silence et de l’épure, il n’est pas pour autant un auteur de l’abstrait. Chez Beckett, les personnages sont de chair et questionnent leur quotidien de la manière la plus directe, la plus déconcertante. Et c’est précisément là que surgit soudain à leur insu une philosophie. Chez Beckett, on philosophe sans en avoir conscience. Du coup les mots et les silences ne résonnent pas de manière psychologique et pesante, mais revêtent une légèreté déconcertante. La lucidité est implacable et sans retour.
 
Les burlesques américains comme Buster Keaton nous amenait à rire ou plutôt à sourire, précisément parce qu’ils semblaient victime, tantôt passive tantôt active, de leur destin. Beckett déroule cette veine et resitue la parole dans la transfiguration du banal. Désarmante et terriblement concrète. Ainsi dans Fin de partie est on amené à (sou)rire des choses les plus graves : du rapport dominé/dominant, de l’absence d’issue, de la quête des origines, du temps qui passe…
 
Le spectacle s’engouffre dans cette recherche de la naïveté d’apparence, dans cette lucidité dévastatrice, dans laquelle la gravité n’est pas jouée mais suggérée, où l’on s’émerveille de la beauté d’un grain de sable pendant que le sablier universel s’évide en continu. Nous n’interprétons pas la philosophie, mais du jeu naît une possibilité de philosopher.
 
Laurent Maindon

 
 
COMPLÉMENT
 
 
DISTRIBUTION
SAMUEL BECKETT
PRESSE