Fuck America



 

 
 

WHY THE FUCK ?


 

J’ai découvert l’œuvre d’Edgar Hilsenrath en lisant le Nazi et le Barbier, roman picaresque et d’une liberté infinie qui ose parler de l’holocauste avec une absence de complexe à couper le souffle. L’important, pour l’auteur, n’est pas de sanctifier les juifs mais de parler de la condition humaine, de ses travers, de ses perversités mais aussi de ses rêves, de ses angoisses et des conditions de sa survie.

J’ai alors poursuivi ma lecture de ses autres romans (Nuit, Le conte de la dernière pensée, Le Retour au pays de Jossel Wassermann…) Puis je suis tombé sous le charme de Fuck America alors même que je cherchais à travailler à l’adaptation d’un roman. L’univers du New York des années 50, l’exil de cet écrivain en devenir, l’humour et la profondeur de ce personnage, Jakob Bronsky, la liberté de ton d’Hilsenrath ont résonné avec mes interrogations actuelles de metteur en scène. Comment prendre une distance poétique pour parler de l’exil et de la migration sans systématiquement coller à la réalité médiatico-journalistique ?

Aujourd’hui il nous importe de nous interroger sur ces mouvements de population, tragiques, mus par la barbarie qu’elle soit d’origine religieuse, politique ou économique. Comment les franchissements de frontière deviennent des actes héroïques de survie, animés bien souvent par la peur ? Pourquoi ces migrations créent elles invariablement chez les populations d’accueil des angoisses maladives de perdre sa propre identité culturelle, d’être dépossédé de sa propriété privée (je ne parle pas uniquement des biens) ? Que se joue-t-il de part et d’autre dans ces franchissements de frontière ? Quelles secousses sur soi ces déracinements provoquent-ils ?

Notre projet tient en quelques mots : Adapter un roman dont la structure narrative est essentiellement composée de monologues intérieurs et de dialogues, restituer la spontanéité des événements en créant un dispositif video sobre et maniable pour passer d’une situation à l’autre dans l’instant et permettre des dialogues entre l’écran et les personnages sur scène, conserver un rythme soutenu dans l’enchainement des scènes afin de conserver la pression qui environne cet exilé, tout cela avec une équipe réduite à 5 comédiens sur scène, voilà le prochain projet du Théâtre du Rictus qui entame avec Fuck America un projet plus vaste autour de l’exil et la migration.

En parallèle, il sera accompagné par la création d’un spectacle de 30 minutes, Guerre de Jane Teller, directement inspiré du transfert de populations et destiné à sensibiliser la jeunesse (du CM1 à la Terminale) sur les complexes questionnements qui s’enroulent inévitablement autour de l’exil et de la migration. Nous proposerons en amont de l’accueil de Fuck America, de travailler en concertation avec l’équipe du théâtre et son réseau scolaire, en accueillant ce spectacle et en proposant débats et ateliers.
Notre questionnement se poursuivra en 2019 avec la création de Chroniques (commande d’écriture passée à Sedef Ecer, écrivain franco-turque et Sonia Ristic, écrivain franco-yougoslave). Comment la Grande Histoire vient modeler, perturber, les petites histoires ? Une dramaturgie « à la Short cuts » (de Robert Altman) sur fond de migrations.

Laurent Maindon

 


 
Intrigue de Fuck America


 
Bronsky, qui a survécu aux ghettos nazis, débarque dans le New York des années 50 dans l’intention d’écrire un roman sur ce qu’il a vécu. Mais l’exil place le migrant dans une société qui l’ignore et que lui rejette, déformant peu à peu le rêve américain. Entre repli communautaire, misère sexuelle et petits boulots, il se fraie un parcours littéraire dans la précarité pour parvenir à ses fins.
Truculent, insolent, Hilsenrath remise les tabous et livre un portrait haut en couleurs de cet émigré juif.
À travers ce récit truculent, l’auteur aborde de plain-pied la déshérence de son personnage, balloté sans cesse entre espérances et déconvenues, écartelé entre le rejet de l’Allemagne nazie qu’il a fuie et celui d’une Amérique qui ne le veut pas. Car il débarque à New York avec une histoire, un passé, un passif. L’exil commence.
Cette histoire, au-delà du style et des obsessions de l’auteur, est emblématique du déracinement, de la modification de l’identité, de nécessités nouvelles.

 
© 1980 Freundeskreis Edgar Hilsenrath e.V.

 
 
COMPLÉMENT
 
 
DISTRIBUTION
EDGAR HILSENRATH
PRESSE